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Traduction d’un article de Fabián Cevallos Vivar et Verónica Yuquilema Yupangui , militant.e.s indigènes d’Equateur (Version originale : https://alicenews.ces.uc.pt/index.php?lang=1&id=26742 )
Le 3 octobre 2019, les communautés, peuples et nationalités représentés par la Confédération des Nationalités Indigènes de l”Équateur CONAIE et le Front Unitaire des Travailleurs FUT ont démarré un soulèvement contre le gouvernement néolibéral du Président Lenin Moreno.
Son « paquet » de politiques répond aux conditions du Fond Monétaire International (FMI) et des élites économiques qui prévoient : 1) Suppression des subsides pour l”essence extra et le diesel -Décret 883- 2) Suppression des impôts à l”importation des GSM, ordinateurs et tablettes 3) élimination ou réduction des tarifs pour les machines, équipements et matières premières agricoles et industrielles 4) Diminution des impôts à l”importation des véhicules de moins de 32.000 dollars 5) Contrats occasionnels renouvelables avec 20% de salaire en moins 6) Les employés du secteur publique n”auront plus que 15 jours de congé plutôt que 30 7) Les travailleurs des entreprises publiques devront contribuer avec un jour de leur salaire par mois.
Cela a provoqué un grand soulèvement populaire : les communautés indigènes ont bloqué les routes, les étudiant.e.s, travailleurs.euses et les femmes se sont auto-convoqués à manifester dans différentes villes et communautés, démarrant une Grève Générale Indéfinie.
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Comme réponse, le 4 octobre, le pouvoir exécutif a décrété l”État d’Exception (état d’urgence) sur tout le territoire national, par lequel le pas est fait vers la restriction des droits humains fondamentaux tels que la libre circulation et mobilité des personnes et surtout, l’intervention militaire des Forces Armées sur tout le territoire équatorien (voir la réponse de la CONAIE).
Les médias publiques et privés ont créé une barrière médiatique pour donner voix uniquement au discours gouvernemental, qui minimise la Grève Nationale et culpabilise les manifestant.e.s de défier les forces de l’ordre et de créer un chaos social.
Au contraire, pour le moment, selon les propres sources du gouvernement, 400 personnes sont détenues, des centaines de blessé.e.s -par arme à feu et impacts de bombes lacrymogènes- et plusieurs morts.
La nuit du dimanche 6 octobre, sur une chaîne nationale, le Ministre de la Décence Oswaldo Jarrín a annoncé que les forces armées sont prêtes à agir et que les peuple ne doit pas les défier. Pendant ce temps-là, le Mouvement Indigène, dans l’exercice de son droit à l’autodétermination et au caractère plurinational de l”État équatorien a décidé de décréter un « État d’Exception dans les communautés indigènes » signalant la brutalité et le manque de conscience des autorités de l’État pour comprendre les demandes populaires qui affectent la population en général.
C’est aujourd’hui le septième jour de la grève nationale indéfinie menée sous l’impulsion de la population indigène la plus pauvre qui s’est prononcée contre les mesures économiques néolibérales. L’élimination des subsides et les réformes du code du travail qui affaiblissent les droits fondamentaux des travailleurs.euses, touchent à la dignité des peuples, consolident la surexploitation des femmes et impliquent un appauvrissement majeur de la population, affectant particulièrement les nationalités indigènes et afroéquatoriennes. Parmi les réclamations, se trouvent aussi la fin des politiques extractives et développementalistes menées de longue date, spécialement l’implantation de projets d”exploitation minière, pétrolière et agro-industrielle dans les territoires indigènes.
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Le gouvernement équatorien en utilisant tous les médias publiques depuis son nouveau siège gouvernemental de Guayaquil, tente de minimiser et discréditer cette grande mobilisation menée par le Mouvement Indigène et organisations sociales. Il dit que derrière ces mobilisations se trouvent des prétentions de coup d’Etat et de conspiration de groupes liés à son ex co-idéologue Rafael Correa, tournant le dos une fois de plus, à la clameur populaire des travailleurs, étudiant.e.s, ménagères, travailleur.euse.s publiques, commerçant.e.s, artisan.e.s et citoyen en général.
Face à ces déclarations tendancieuses, la CONAIE éclaircit avec fermeté dans son dernier communiqué du 7 octobre 2019 : « Nous ne sommes pas l’instrument de Correa, Lasso ou Nebot, nous sommes le peuple organisé revendiquant et exigeant des droits, avec un agenda propre, discuté avec nos bases et avec la certitude qu”on obtient des droits seulement par la lutte. A nous, jamais on ne nous a rien offert, raison pour laquelle la lutte est notre unique chemin ». Et ils ratifient avec insistance leurs réclamations : « Nous rejetons les mesures économiques, dénommées « le paquet », et nous demandons l’annulation complète de la lettre d’intention signée avec le Fonds monétaire international (...) ainsi que la fin des essais de privatisation des entreprises publiques sous couverture de la figure « concession ».
Les recettes néolibérales promues par l’alliance entre le gouvernement et le FMI ont traditionnellement impliqué des formes violentes d’approfondissement du colonialisme et d’appauvrissement, comme ce fut le cas lors des crises de 1997 et 2000, au cours desquelles des mouvements indigènes ont provoqué la chute des anciens présidents de droite Abdalá Bucaram et Jamil Mahuad. Pour cette raison, une fois encore, ce sont les communautés mobilisées qui, usant de leur droit de protestation sociale comme d’un droit constitutionnel légitime, sont descendues dans la rue pour que l’histoire ne se répète pas.
Vive le soulèvement indigène, vive les gouvernements communautaires !